Ça avait commencé comme une danse, danse des corps qui s'approchent et se frôlent et s'accordent, à la musique des mots qui s'écoulaient légers, notes et pauses, et harmonie. On se racontait, la conversation coulait-courait, sur tout et rien, essentielle et dérisoire : une autre musique la traversait, harmonique muette et bavarde du désir...
Tout parle plus que les mots dans ces moments, les yeux les mains, les silences, les sourires, les regards qui s'apprivoisent, les frissons les rires à n'en plus finir...
Les mots qui s'enhardissent. Les doigts qui se trouvent et qui jouent. Les mains qui se faufilent et qui touchent. Les peaux qui se rencontrent, qui s'attirent, qui se découvrent. Contact. Le plaisir tactile, sous la main qui caresse. Le plaisir frisson, du corps caressé.
C'est un dialogue sans mots, les peaux, les lèvres, les bouches sans voix ont tant à se dire...
Alors nous avons poursuivi la conversation... jusque tard dans la nuit. Cette nuit de braise et de baise, de jeu de nos corps, de gravité légère... de légèreté grave... d'une soif inextinguible : il semble qu'on ne jouira jamais jusqu'au bout, qu'on n'en finira pas de cette soif, de cette faim de nos peaux, de nos corps, de se découvrir, de cette danse sans musique, de ce point d'orgue harmonique...
Aux murmures du petit jour, on a peu dormi.
Et le désir était toujours là, de sa note ténue, tenue, têtue...
Image : Isabel Pessoa